C’est avec une grande tristesse que nous avons pris connaissance du décès d'Yves Sillard, commandeur de la légion d’honneur survenu à l'âge de 87 ans.
Ses obsèques ont eu lieu à l’église Notre Dame La Collégiale de Villeneuve Les Avignon ce mardi 18 avril 2023 à 15h.
 
Homme de l'aéronautique dans son acception la plus large, polytechnicien et ingénieur Supaéro, il fut tour à tour pilote de transport dans l'Armée de l'Air, puis ingénieur de l'armement au centre d'essais en vol. En 1964 il est nommé au Secrétariat général à l'Aviation civile comme responsable du programme Concorde.
Mais c'est l'année suivante que sa carrière va prendre une toute autre dimension puisqu'il devient le responsable de la construction du centre spatial guyanais à Kourou puis un des pères de la fusée Ariane. Directeur du centre spatial, puis du CNES, il sera ensuite président directeur de l'IFREMER, puis sera nommé Délégué Général pour l'Armement. Il prendra par la suite la direction de Défense Conseil International avant d'être nommé secrétaire général adjoint de l'OTAN pour les affaires scientifiques et l'Environnement.
Passionné par les phénomènes spatiaux non identifiés, il dirigera le GEIPAN (Groupe d'Etudes et d'Informations sur les Phénomènes Aérospatiaux Non identifiés) et sera à l'initiative de l'ouverture au public des archives classifiées sur ce sujet, à la demande du président Chirac.
 
C'est notre président de section Guy Château qui a lu l'hommage à Yves Sillard qui avait été préparé par le LCL Stéphane MUDOY
(Président du comité SMLH de Villeneuve-lez-Avignon) en mission à l'étranger.
 
Mon Général, cher Yves,
 
Vous voyez le jour le 5 janvier 1936 à Coutances en Normandie, face à la Manche, au pied de la cathédrale Notre Dame et de ses tours lanternes. C’est là que vos parents Madeleine et Roger ont leur maison de vacances. Normand de souche, de cœur et d’esprit, votre enfance est pourtant parisienne : c’est là que votre père exerce son métier d’avocat. Elève brillant, vous passez votre bac à 16 ans et toute votre scolarité vous destine à de brillantes études Après à l'École polytechnique (promotion 1954), vous choisissez comme le plus grand nombre de polytechniciens à cette époque, le corps de l'armement, et plus particulièrement sa filière aéronautique. Vous disiez « j'ai eu envie d'être ingénieur de l'Armement et à cette époque-là ingénieur militaire de l'Air, en particulier pour pouvoir voler et piloter. Tout en étant dans une véritable carrière d'ingénieur, ça m'intéressait de piloter ! »

 

Vous entrez donc en école d'application à l'École Nationale Supérieure de l'Aéronautique et de l'Espace (SUPAERO), dont vous serez diplômé en 1959. Vous serez ensuite breveté pilote militaire de l'Armée de l'Air et vous totaliserez d’ailleurs au cours de votre carrière, quelques 1200 heures de vol.
Mais votre carrière comme ingénieur de l'armement commence véritablement en 1960 au centre d'essais en vol (CEV) de Colomb Bechar, en Algérie. Vous y serez responsable des premiers essais de la force de dissuasion et y rencontrerez Pierre Chiquet, responsable pour sa part de l’équipement des champs de tir.

La France prévoyait à cette époque de créer un immense champ de tir de 3000 km de long partant de Colomb Béchar vers le sud du Sahara pour tester les engins balistiques et tirer ses premières fusées Diamant... Mais l’indépendance algérienne en décida autrement.

Après ces 3 années algériennes vous revenez en France, à Cazaux en Gironde et postulez pour rejoindre le CNES, sans succès. Estimant que vous ne vous occupez plus d’armement, la DGA vous nomme en 1964, au Secrétariat Général à l'Aviation Civile comme ingénieur responsable du programme Concorde. Vous défendez alors les intérêts des industriels français face aux anglais dans le choix des équipements futurs de cet avion mythique.

L'année suivante, Pierre Chiquet, votre ancien collègue algérien, vous appelle finalement au CNES à ses côtés, pour débuter la construction du centre spatial guyanais. Vous aurez alors la charge de la réalisation du champ de tir et des infrastructures.
Tout est à faire ! De quelques bungalows créoles au milieu des « pri-pri » (les marais), Kourou deviendra par votre action et celles de vos équipes, une ville internationale aujourd’hui peuplée de 25000 habitants. Vous réaliserez le tour de force de construire le centre, qui plus est dans les délais, à partir d’un accord avec le ministère des finances, qui vous octroie en tout et pour tout, 330 millions de francs... et pas un centime de plus !

Vous dirigez le CSG de 1969 à 1971 puis êtes nommé, toujours au sein du CNES comme directeur des lanceurs de 1973 à 1976. A cette époque, les fusées Véronique cèdent progressivement la place au projet européen de lanceur Ariane, et alors qu’en 1976, vous prenez la direction générale du CNES que vous occuperez jusqu'en 1982, vous mènerez à bien l’événement historique du 24 décembre 1979 : le premier tir d’Ariane 1 qui fera entrer la France et l’Europe dans l’âge de l’autonomie spatiale.

En parallèle, en 1977, vous participez à la création du Groupe d'Etudes des Phénomènes Aérospatiaux Non identifiés (GEPAN). Ce service opérationnel basé sur des enquêtes liées aux observations rapportées par diverses sources, collecte des témoignages, les analyse, et cherche les explications scientifiques relatives à leur origine. Vous avez l’intuition qu’il pourrait exister d’autre formes d’intelligence. Sous votre direction, un ouvrage collectif « phénomènes aérospatiaux non identifiés : un défi à la science » met en lumière les pistes actuellement suivies pour poursuivre cette collecte et l’analyse de ces données. 30 ans plus tard, en septembre 2005, à la tête du comité de pilotage de ce même groupe et à la demande du Président Jacques Chirac, vous serez à l'initiative de l'ouverture au public des archives jusque- là classées secret-défense concernant ces phénomènes aérospatiaux non identifiés (communément appelés OVNI).

Promu ingénieur général de 2 e classe en 1981, vous quittez le domaine spatial et devenez de 1982 à 1988, président directeur de l'IFREMER. La mer, cet autre espace qui exerce sur vous un même attrait et dont vous déclarez dans une interview au Monde en 1985 « qu’ils présentent avec l’espace, à des échelles infiniment différentes, la même étonnante diversité. Deux mondes extrêmes et hostiles, l'un caractérisé par l'absence presque totale d'atmosphère, l'autre par
des pressions considérables, dans lesquels il n'est possible à l'homme de vivre que par une victoire sur la matière. Les maîtres mots de leur conquête sont rigueur, méthode, fiabilité et sécurité. »

Le 6 janvier 1989, retour à vos premières amours professionnelles ! vous êtes nommé Délégué Général pour l'Armement auprès du ministre de la défense, fonction que vous exercerez jusqu’en 1993. Vous êtes désormais responsable de préparer l’avenir des systèmes de défense français, d’équiper les forces armées et de promouvoir les exportations de l’industrie française de défense. A cette époque, alors que le Rafale prend tout juste son envol et alors que le contexte historique vous donne le sentiment de, je cite : « vous battre dos au mur entre les politiques d’un côté et les industriels de l’autre », vous visualisez déjà ce que sera l’aviation de combat des 30 prochaines années.
Vous devenez ensuite président-directeur général de la société Défense Conseil International (DCI) de 1994 à 1997, puis vous êtes nommé chargé de mission pour la politique spatiale auprès du ministère de la Défense de l’époque, Charles Million. Le 19 janvier 1998, vous êtes enfin nommé par le secrétaire général de l'OTAN, Javier Solana au poste de secrétaire général adjoint de l'OTAN pour les affaires scientifiques et l'environnement, poste que vous occuperez jusqu’à vos 65 ans, limite d’âge du poste.

Vous quittez alors Bruxelles, pour les rives de la Charente pour profiter d’une retraite bien méritée. Vous pouvez alors vous adonner pleinement à 3 de vos plaisirs : les cigares, le Cognac et le vélo de route.

Vous épousez Martine en 1999, ici même à Villeneuve lez Avignon et après plus de 20 ans passé en Saintonge, c’est malheureusement la maladie qui vous rapprochera définitivement de nous.
Multi décoré, vous n’afficherez jamais par modestie que votre légion d’honneur, reflet parfait de la volonté de Napoléon Bonaparte qui souhaitait qu’elle récompensât, à la fois « ses soldats et ses savants ». Fervent défenseur de la puissance du collectif, courageux, tenace, vous illustrez parfaitement les valeurs des aviateurs : respect, intégrité, sens du service et excellence, ainsi que la pensée de Socrate, qui 25 siècles plus tôt avait déclaré ; « Si quiconque devait obtenir des ailes et voler jusqu’au sommet du ciel, enfin il comprendrait entièrement le monde dans lequel il vit ».

A votre épouse, à vos belles filles et petits enfants ainsi qu’à l’ensemble de votre famille et de vos proches, au nom de la cohorte des légionnaires nous présentons nos condoléances attristées les plus sincères

 

 

 

 

 

Si vous souhaitez voir et entendre Yves Sillard parler de son aventure spatiale guyanaise, nous vous invitons à l'écouter ici:

https://www.dailymotion.com/video/xc2k2d

 

 

 

 

 

 

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